Conquereuil - 27 juin 992
Pour le contrôle de la Bretagne
Le 27 juin 992, la bataille de Conquereuil marque la victoire de Foulques III Nerra, comte d'Angers, sur Eudes 1er de Blois. La querelle opposant ces puissants seigneurs pour le contrôle de la Bretagne prend d'autant plus d'importance que le premier soutient Hugues Capet, tandis que le second est un ennemi acharné du roi.
Ennmis acharnés, Foulques Nerra et Eudes, comte de Blois, de Tours et de Chartres, n'en finissent pas de se combattre. Cette fois, ils se disputent la suzeraineté de la Bretagne.
Fin mai-début juin 992, se posant en défenseur des droits du jeune Judicaël, fils bâtard de Hoël, l'ancien comte de Nantes, Foulques Nerra rassemble une armée et assiège Nantes. Achetée à prix d'or, la garnison lui ouvre les portes de la ville. Toutefois, la forteresse, construite deux ans plus tôt à l'ouest de la cité, résiste, obligeant le comte d'Angers à se retirer pour lever davantage de soldats.
Simultanément, le comte Conan 1er de Rennes et de Nantes, qui a prêté hommage à Eudes de Blois, accourt avec ses Bretons, qu'il devise en deux groupes. Le premier se dirige vers Nantes pour bloquer la ville. Le second, qu'il commande en personne, s'installe à proximité de Conquereuil, lieu, où dix ans plus tôt, il a déjà vaincu les Angevins. A ses yeux, ce site ne peut que lui porter chance.
Après avoir reconnu le terrain, Conan aménage des caches sous terre, formant un immense piège. Pour ce faire, "il remplit d'eau un grand nombre de fosses et couvrit leur ouverture de branchages, de broussailles et de chaume, que de longues perches supportaient, de manière à donner l'apparence de solidité. Et, afin que cette surface factice ne pût être reconnue, il ramassa de la fougère, la répandit dessus et dissimula ainsi son stratagème". Il range ensuite son armée en ordre de bataille et attend l'ennemi de pied ferme.
Foulques Nerra ne tarde pas à paraître accompagné de ses vassaux et d'un contingent de mercenaires. Mais, se laissant surprendre par l'attitude figée des rudes Bretons, il pense qu'ils n'osent pas avancer. Avec sa fougue habituelle, il lance donc la charge, et inévitablement l'assaut tourne au drame. Sous le poids des chevaux, les perches se cassent. Dans un vacarme infernal, les cavaliers roulent pêle-mêle au fond des fosses, tandis que les Bretons criblent de flèches les malheureux qui tentent de s'échapper.
Le massacre est effroyable : on dénombre les corps de plus de mille chevaliers angevins. Se croyant perdu, Foulques Nerra ordonne le repli sans plus attendre. Tournant bride, il entraîne derrière lui le corps de réserve. Pour la forme, le comte Conan, bien que déjà assuré de sa victoire, les talonne un bout de chemin.
Au soir de la terrible déroute des Angevins, les Bretons sont maîtres du terrain. Quand il met enfin pied à terre, le comte Conan, ruisselant de sueur, ne songe qu'à se débarrasser de sa lourde armure. Pour ôter sa cotte de mailles, il se retire dans les broussailles. Mais, sans y prendre garde, il s'est avancé près des lignes de l'adversaire. Trop occupé à se mettre à l'aise, il ne remarque pas un Angevin embusqué dans les taillis de genêts. Patiemment l'homme attend que le chevalier soit privé de toute défense. Alors, se ruant sur lui, il le transperce de son épée.
Quand les Bretons découvrent le corps sans vie de leur chef, ils sont si abattus qu'ils laissent le champ libre à leurs adversaires et regagnent Nantes.
Evidemment, ce départ ne passe pas inaperçu. Aussitôt Foulques Nerra revient à la charge. Par surprise, il s'abat sur l'armée ennemie et l'écrase. Puis il entre dans Nantes et s'empare de la citadelle, jusque-là imprenable!
Mais la victoire n'assure pas seulement à Foulques Nerra une prééminence sur le pays nantais. L'échec et la mort du comte Conan marquent aussi la défaite d'Eudes de Blois.
La bataille de Conquereuil restera dans les annales pour une raison de stratégie militaire : elle est l'une des premières batailles rangées du Xème siècle.