Montoire-sur-le-Loir - 24 octobre 1940

La célèbre poignée de main entre Pétain et Hitler.

24 octobre 1940 - Entrevue de Montoire-sur-le-Loir entre Philippe Pétain et Adolf HitlerDès son entrée en fonction, le maréchal Pétain comprend qu’il lui faut négocier un allégement des conditions d’armistice. Son principal ministre, Pierre Laval, trouve heureusement un interlocuteur bien disposé: c’est Otto Abetz, ambassadeur du Reich à Paris, beaucoup plus francophile que son entourage. Abetz rêve de réconcilier durablement l’Allemagne et la France; Laval va audacieusement à sa rencontre; le maréchal voit là une amorce de dialogue.

Laval voudrait rencontrer von Ribbentrop, ministre allemand des Affaires étrangères; il obtient l’appui d’Abetz; les dispositions d’Hitler sont justement favorables: désirant intervenir en Afrique contre les Anglais et les gaullistes, il aurait besoin du concours français.

D’autre part, pour atteindre directement le Maroc, la Wehrmacht doit traverser la zone française libre et le territoire espagnol; le chancelier doit donc obtenir le consentement de Pétain et de Franco. Ce dernier répugne à se compromettre avec l’Allemagne, craignant la réaction britannique; il le fait savoir à Pétain le 2 octobre. Mais le Führer compte sur une rencontre personnelle avec le maréchal et le caudillo pour les convaincre. Il prend donc rendez-vous avec Franco à Hendaye pour le 23 octobre et charge Abetz de lui ménager une entrevue avec les Français à l’étape du retour. Abetz convoque Laval, l’emmène et lui révèle qu’il va rencontrer non pas Ribbentrop, mais Hitler lui-même. Laval est à la fois stupéfait et séduit.

L’entrevue a lieu en gare de Montoire, près de Tours, le 24 octobre; Hitler exprime au ministre français son désir de rencontrer le maréchal. Rentré à Vichy, Laval persuade Pétain d’accepter cette "occasion unique".

Mais, entre-temps, n’ayant pu s’entendre avec Franco, Hitler a renoncé à ses projets méditerranéens; il reçoit cependant Pétain honorablement... Et c’est la fameuse poignée de main qui, pour beaucoup de Français, compromet gravement le maréchal. Sondé par Hitler, Pétain refuse d’envisager une guerre contre l’Angleterre; mais il relève que la solidité d’une paix future dépend de la générosité de l’Allemagne. Que celle-ci la manifeste en libérant les prisonniers et en assouplissant le régime d’occupation. Hitler reste de glace. Le maréchal accepte alors l’idée d’une "collaboration" franco-allemande; ce terme, fort vague dans son esprit, fera plus tard fortune selon le sens que chacun lui donnera.

Cette poignée de main comporte toutefois une forte valeur symbolique, qui lui confère une importance historique et politique. De ce fait, les images de l’événement réalisées par la propagande nazie et largement diffusées jouent, notamment en France, un rôle considérable dans les représentations, la perception et les conceptions associées à la fois au régime de Vichy et au maréchal Pétain. De cette ambiguïté, le régime de Vichy, quoi qu’il ait voulu, restera prisonnier jusqu’au bout, nonobstant le message radiodiffusé du maréchal Pétain, 30 octobre 1940 :

"C’est librement que je me suis rendu à l’invitation du Führer. (…) C’est dans l’honneur et pour maintenir l’unité française (…) que j’entre aujourd’hui dans la voie de la collaboration. Cette politique est la mienne."

 

 

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