HENRI IV (1367-1413)
Version longue
Roi d'Angleterre et seigneur d'Irlande de 1399 à 1413.
Duc d'Aquitaine et de Lancastre en 1399,
duc de Hereford de 1397 à 1399,
Comte de Northampton de 1384 à 1399.
Naissance, famille et jeunesse
Henri vit le jour en avril 1366 au château de Bolingbroke dans le Lincolnshire, fils de Jean de Gand (1340-1399), lui-même fils du roi Édouard III d'Angleterre et donc prétendant au trône de Richard II (qui était le petit-fils d'Édouard III et le fils d'Édouard le Prince Noir, 1330-1376). Jean était un personnage puissant mais impopulaire qui avait été écarté du trône parce qu'il avait soutenu des nobles et des fonctionnaires corrompus identifiés par le Parlement. La mère d'Henri Bolingbroke était Blanche de Lancastre, fille héritière d'Henri de Grosmont, duc de Lancastre. Le jeune noble reçut le titre de comte de Derby, le premier d'une longue série qu'il allait acquérir au cours de son parcours.
Henri épousa Marie de Bohun (née vers 1369) le 5 février 1381, mais elle mourut en couches en 1394. Le fils le plus célèbre du couple était Henri, futur Henri V, né le 16 septembre 1387. Henri, devenu roi, se maria à nouveau le 7 février 1403, cette fois avec Jeanne de Navarre (1370-1437) fille du roi Charles II de Navarre dit "Charles le Mauvais" et de Jeanne de France.
Henri avait reçu une éducation typique de la noblesse, où il avait montré son goût pour les tournois médiévaux, son courage, sa piété et son intérêt pour la littérature. Le jeune Henri eut sa part d'aventure lorsqu'il alla à deux reprises combattre les païens en Lituanie dans le cadre des longues croisades du Nord (12-15e siècle) aux côtés des chevaliers teutoniques. Il y aurait également un pèlerinage à Jérusalem avant qu'il ne se concentre sur ses ambitions en Angleterre.
Rivalité avec Richard II
En 1386, Henri Bolingbroke devint l'un des principaux barons d'Angleterre et fit partie du groupe de nobles mécontents qui s'insurgèrent contre le favoritisme du roi envers Robert de Vere, comte d'Oxford. Richard avait fait de ce dernier, extrêmement impopulaire, le duc d'Irlande en décembre 1387. Les barons mécontents passèrent à l'action en battant Robert de Vere et ses partisans à la bataille de Radcot Bridge, près d'Oxford. Henri fut alors l'un des cinq lords appelants qui convoquèrent l'"Impitoyable Parlement" pour retirer le pouvoir au jeune Richard II. Le roi prendrait sa revanche en 1397 lorsque, plus âgé, plus sage et plus sûr de son trône, il rassemblerait les conspirateurs et les ferait exécuter ou exiler. Henri, le cousin du roi, se trouva, heureusement pour lui, dans cette dernière catégorie.
Initialement, il semblait qu'Henri avait survécu à la purge du roi, mais une querelle entre Bolingbroke et Thomas Mowbray, duc de Norfolk - les deux lords appelants survivants, qui avait été organisée par Richard, conduisit les deux ducs à s'affronter dans une joute médiévale à Coventry en septembre 1398. Alors qu'une foule immense attendait avec impatience d'assister à la finale d'un événement riche en apparat, le roi s'avança et interdit aux deux ducs de se battre. Richard exila alors Mowbray à vie et Bolingbroke pour dix ans. Henri partit pour Paris mais il serait de retour en Angleterre bien plus tôt que Richard ne l'avait espéré.
Le 3 février 1399, Jean de Gand mourut et Henri devint ainsi le Duc de Lancastre. Henri avait maintenant une excuse pour revenir en Angleterre - il pouvait clamer qu'il voulait récupérer ce qui lui reviennait de droit, les terres de la famille Lancastre que Richard s'était approprié. Le roi avait entre temps prolongé l'exil d'Henri de 10 ans à la vie.
Cependant, il s'avéra qu'Henri revint non seulement pour réclamer ses domaines, mais aussi un prix bien plus important.
Couronnement
Henri partit de Boulogne et débarqua à Spurn Head, au nord-est de l'Angleterre, avec une petite armée, peut-être seulement 300 hommes, puis marcha vers le sud pour faire valoir ses droits en juin-juillet 1399. L'invasion tombait à point nommé car Richard était en Irlande. Sans leur roi, le soutien pour la couronne s'amenuisa, peut-être aussi parce que Richard n'avait jamais été très populaire en raison du choix étrange de ses compagnons de cour et de son manque de verve dans la guerre contre les Français pendant la guerre de Cent Ans (1337-1453).
La guerre contre les Français avait commencé de manière fantastique pour l'Angleterre, mais à l'époque du règne de Richard, Charles V de France, alias Charles le Sage (roi de 1364 à 1380), avait fait en sorte que les seules terres françaises appartenant à la Couronne anglaise soient Calais et une mince tranche de Gascogne. Les pirates français se déchaînaient dans la Manche et de nombreux barons anglais souhaitaient une guerre plus directe que celle à laquelle ils assistaient. Richard avait échoué dans deux des domaines les plus importants pour un roi médiéval: remporter des victoires militaires pour apporter de l'argent et des terres, et produire un héritier mâle. Si l'on ajoute à ces échecs son approche dictatoriale du gouvernement, on comprend mieux pourquoi les barons envisagèrent l'idée d'un changement de souverain, d'autant plus qu'Henri était un chef militaire compétent, qu'il avait une forte personnalité et qu'il était aussi de sang royal.
En août 1399, Richard, de retour d'Irlande, sortit de sa cachette au château de Conwy, au Pays de Galles, pour être ensuite emprisonné à la Tour de Londres. Le 29 septembre, Henri obligea Richard à signer sa propre abdication. Le 30 septembre, le Parlement désigna officiellement Henri comme successeur de Richard, et c'est ainsi qu'Henri Bolingbroke fut couronné Henri IV d'Angleterre le 13 octobre 1399, lors d'une somptueuse cérémonie à l'abbaye de Westminster. Lors d'un curieux incident, le roi fit tomber la pièce d'or que les monarques nouvellement couronnés sont censés offrir cérémonieusement à Dieu. La pièce roula et on ne la revit plus jamais, ce qui était de mauvais augure.
Pour marquer le début d'une nouvelle ère, Henri avait créé, la veille de son couronnement, un nouveau groupe de chevaliers médiévaux appelé les Chevaliers du Bain (ce qui deviendrait bien plus tard l'Ordre chevaleresque du Bain. Henri, qui prenait lui-même un bain chaque semaine - une fréquence inhabituelle au Moyen Âge - désigna 46 de ces chevaliers, qui devaient tous prendre un bain en signe de purification et être bénis par un prêtre avant d'être investis.
Le 14 février 1400, l'ex-roi fut assassiné au château de Pontefract, dans le Yorkshire, presque certainement parce que les fidèles de Richard avaient déployé des efforts, bien que mineurs, pour le remettre sur le trône. Henri fit même exposer le corps de Richard à la Tour de Londres, au cas où des rebelles potentiels penseraient qu'il était encore en vie et prêt à mener un coup d'État. Les Plantagenêts qui avaient régné sur l'Angleterre depuis Henri II d'Angleterre en 1154 furent désormais remplacés par la Maison de Lancastre.
Rébellion et complot
Henri fut confronté à une crise en septembre 1400, au Pays de Galles, où Owain Glyn Dwr (né vers 1359) s'était autoproclamé Prince de Galles. Plus inquiétant encore, le Gallois avait le soutien du comte de March, dont le fils Edmond Mortimer, en tant qu'arrière-arrière-petit-fils d'Édouard III (par sa mère Philippa de Clarence) , était un prétendant possible au trône d'Henri.
Les Français soutenaient également les Gallois et saisirent, comme d'habitude, toute occasion de déstabiliser le trône anglais. Pendant ce temps, les barons anglais préparaient leur propre rébellion en Angleterre. Le groupe de mécontents comprenait des noms notables tels que le comte de Worcester, le comte de Northumberland et le célèbre chevalier médiéval Sir Henry "Hotspur" Percy (1364-1403).
Sir Henry se tourna d'abord vers le problème anglais et rencontra en combat les barons rebelles le 21 juillet 1403 à la bataille de Shrewsbury. L'armée du roi fut victorieuse, Henri se battit avec courage, Sir Percy fut tué et Worcester exécuté. Le comte de Northumberland, le comte de March et d'autres barons rebelles n'abandonnèrent pas si facilement et ils changèrent de stratégie et commencèrent à conspirer avec l'archevêque Scrope d'York et Owain Glyn Dwr. Le roi Henri découvrit ce complot visant à morceler son royaume sous ses pieds, et le comte de Northumberland s'enfuit en Écosse.
Les choses s'améliorèrent pour Henri au fil de la décennie. En mars 1406, le jeune prince Jacques, futur Jacques 1er d'Écosse (1406-1437), fut capturé lors du naufrage de son navire au large de la côte est de l'Angleterre. Le prince Jacques fut retenu prisonnier dans la Tour de Londres et une forte rançon fut demandée pour sa libération. Malheureusement pour Jacques, son père mourut peu après et, bien qu'il soit devenu roi d'Écosse, personne ne se manifesta pour payer la rançon, si bien qu'il fut maintenu dans un confortable confinement pendant 18 ans.
En février 1408, après qu'Henri ait remporté la bataille de Bramham Moor contre les rebelles gallois et anglais, Edmond Mortimer fut emprisonné et l'archevêque d'York et le comte de Northumberland exécutés. En 1409, la rébellion galloise fut définitivement écrasée lorsque les derniers rebelles furent capturés au château de Harlech. Owain Glyn Dwr se retira dans les montagnes et on n'en entendrait plus jamais parler.
Le fils homonyme d'Henri dirigea l'armée qui reprit Harlech, capturant au passage le fils aîné d'Owain Glyn Dwr, et il devint rapidement la star de la cour royale. Le prince Henri, qui était le "vrai" prince de Galles, mena également une armée en France pour exploiter l'anarchie qui y régnait suite à la folie du roi Charles VI de France (roi de 1380 à 1422), mais l'expédition n'aboutit à rien. Pourtant, le prince surpassa son père et des frictions se développèrent entre eux, notamment à cause du désir du prince d'adopter une approche plus militariste vis-à-vis de leur grand rival français. Le moment du jeune Henri viendrait bien assez tôt.
Le "long Parlement"
Une autre source de friction à la cour futt la relation du roi avec le Parlement. Le "Long Parlement" de 1406 siégea pendant une période inhabituellement longue, de mars à décembre, alors qu'il délibérait sur la question toujours épineuse des finances de l'État. Le Parlement était plutôt dépité par le manque de succès contre les rebelles gallois ou la présence de troupes françaises au Pays de Galles. Les impôts élevés du roi ne donnaient aucun résultat sur le champ de bataille, les dépenses de la cour étaient jugées excessives et le Parlement insistait pour que, au minimum, le roi écoute ses préoccupations avant d'approuver une nouvelle série d'impôts. Ainsi, le "Long Parlement" fut un autre petit pas sur le long chemin vers une monarchie constitutionnelle.
Mort et succession
Henri IV mourut le 20 mars 1413. Il n'avait que 46 ans environ et s'était consumé peu à peu, rongé par la maladie - peut-être la lèpre ou un eczéma sévère - depuis 1406. En outre, le roi avait souffert de multiples attaques cérébrales à la fin de sa vie, alors que son esprit était déjà depuis longtemps troublé par les remords sur la façon dont il avait traité le roi Richard. Il fut enterré dans la cathédrale de Canterbury. À Henri succéda son fils de 25 ans, Henri V d'Angleterre, qui fut couronné dans l'abbaye de Westminster le 9 avril 1413. Henri V devint l'un des plus grands monarques combattants de l'histoire européenne en battant les Français à la bataille d'Azincourt en 1415 et en s'emparant de la Normandie et de Paris. Cependant, son règne serait bref, écourté par la maladie, et l'éviction du roi légitime Richard viendrait hanter les descendants des Lancastre alors que les deux maisons de Lancastre et d'York s'affronteraient pour le trône dans ce qui est connu sous le nom de Guerre des deux Roses (1455-1487).
Source : Article partiellement ou en totolité issu de l'article de Cartwright, M. (2020, janvier 29). Henri IV d'Angleterre [Henry IV of England]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-18712/henri-iv-dangleterre/