Adalbéron de Reims (v.920-988?)
Archevêque de Reims de 969 à 988
Adalbéron d'Ardenne, (né vers 920 ou 925, mort en janvier 988 ou 989) est le 39ème archevêque de Reims, et grand chancelier sous Lothaire et Louis V. Il fut un des plus savants prélats de France au Xème siècle
Fils d’un comte de Metz, chanoine à Metz, il est issu de la puissante famille d'Ardenne ou Wigéricides, liée par le sang à la fois à la famille impériale ottonienne ainsi qu'à la lignée des rois de Francie. Il recoit une éducation trés poussée au monastère lorrain de Gorze, (fondé en 749 par l’évêque de Metz Chrodegang) foyer principal intellectuel lotharingien, qui est une abbaye pionnière dans le processus de réforme monastique qui commence au début du Xéme siécle.
Adalbéron est élu archevêque en 969. Prélat remarquable, il réforme son diocèse. Il devient (sous l’influence de Gerbert ? ) partisan de l’Empire restauré en 962. En 985, il tente de déjouer la tentative du roi Lothaire pour s’emparer de la Lorraine, enjeu permanent entre France et Germanie. Accusé de trahison, il parvient à se justifier. Mais le nouveau roi Louis V le poursuit de sa vindicte et le traduit le 18 juin 987 devant une assemblée réunie à Compiègne. Après la mort du roi, la présidence de l’assemblée passe à Hugues Capet, duc de France, le plus important personnage du royaume après le roi ; Hugues obtient facilement la disculpation d’Adalbéron qui joue un rôle de premier plan dans la suite des événements.
En signe de reconnaissance, Adalbéron proposa que le duc de France fût nommé roi à titre provisoire, le trône étant vacant. Il déclama un discours célèbre, en juin 987 à Noyon, aux Grands qui élurent Hugues. Adalbéron avait pour objectif de réformer l'Eglise. Avec Gerbert d'Aurillac, il militera pour la création d'un empire unique à l'image de l'empire néo-carolingien des Otton. Mais Hugues Capet ne l'entend pas ainsi et il fera sacrer son fils pour asseoir sa dynastie en France.
Il meurt en janvier 988 (ou 989). On trouve plusieurs de ses lettres parmi celles de Gerbert, et deux de ses discours dans la Chronique de Moissac. L'église de Reims lui était redevable de la plus grande partie de ses biens.
Un peu avant de mourir Adalbéron désigne Gerbert d’Aurillac pour être son successeur mais c’est finalement Arnoul qui sera élu.
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Extrait du discours de juin 987 de l'archevêque de Reims Adalbéron en faveur du duc Hugues :
« ... Puisque Louis, de divine mémoire, a quitté cette terre sans laisser d'enfants, il a fallu choisir, après mûre délibération, quelqu'un qui put le remplacer sur le trône pour que l'Etat abandonné sans pilote ne vînt pas à sombrer. Nous avons dernièrement jugé utile d'ajourner cette décision pour permettre à chacun de venir exposer à l'assemblée l'idée personnelle que Dieu lui aurait inspirée. En réunissant ces avis individuels, on pourrait, pensions-nous, extraire de l'ensemble des opinions de la multitude un résumé du sentiment général. ... Nous voici donc maintenant rassemblés. Evitons, à force de sagesse et de loyauté, que la haine n'étouffe la raison et que la passion n'affaiblisse la vérité. Nous n'ignorons pas que Charles a ses partisans, qui prétendent qu'il a droit au trône parce que ses parents le lui ont transmis. Mais, si on aborde la question, on verra que le trône ne s'acquiert pas par droit héréditaire et qu'on ne doit y élever que celui qui se distingue non seulement par la noblesse de son corps, mais encore par la sagesse de son esprit, que celui qui a l'honneur pour bouclier et la générosité pour rempart [...]. Choisissez-vous donc le duc qui se recommande par ses actions, sa noblesse et sa puissance militaire ; vous trouverez en lui un défenseur non seulement pour l'Etat, mais encore pour vos intérêts privés. Grâce à son dévouement, vous aurez en lui un père. Qui a jamais eu recours à lui sans obtenir son patronage ? Quel est l'homme qui, arraché à la protection des siens, ne leur a pas été rendu par ses soins ? Élévation d'Hugues sur le trône. Cet avis fut adopté et unanimement approuvé ; le duc fut levé sur le trône du consentement de tous et, couronné à Noyon par l'archevêque et les autres évêques, proclamé roi... ». Richer, Histoire de France (éd. et trad. R. Latouche, Paris, Belles Lettres, 1964, II, p. 159-163).